Gueule de moucheur #2 : Glenn Delporte – guide de pêche à la mouche au ¨Pays Basque

interview “Gueule de moucheur” de Glenn Delporte, guide de pêche à la mouche au Pays Basque www.madeinriver.fr

Fred : « Comment es-tu arrivé à la pêche à la mouche ? »

J’ai commencé à pêcher à la mouche vers l’âge de 12 ans. Ma grand-mère m’avait offert « la VHS d’Au milieu coule une rivière » et le déclic est apparu à ce moment-là. Un peu cliché non ? Quelques temps après j’ai fait l’acquisition de ma première canne, une décathlon mackenzie 8,6 soie de 5 que je garde précieusement surtout qu’un ami d’Ustaritz me l’a remise en état et renommée « l’Egurguy ». Parfois je la sors pour pêcher en noyée sur la grande Nive.

À l’époque, je n’ai pas persévéré et je ne m’y suis vraiment replongé qu’en 2006, lorsque que j’ai mis mon premier pied à l’AAPPMA de la Nive. En 2007, j’ai passé un an dans les rayons du célèbre magasin l’Ami Moucheur à Trois Rivières au Québec où j’ai effectué ma 4ème année de fac en écologie des eaux douces. J’y ai appris à monter mes premières mouches d’ailleurs et acheté mon premier ensemble pour le brochet. Je pensais déjà à mon retour sur les étangs landais que je fréquente régulièrement en automne hiver. À mon retour au Pays Basque, je me suis pleinement plongé dans cette passion qui ne me lâche plus et qui est pour moi un univers, dont je ne discerne plus très bien les limites, tellement il offre de perspectives.

Fred : « Quels sont les 2 ou 3 conseils que tu pourrais donner à un jeune moucheur débutant ? »

Je n’ai pas vraiment de conseils à donner si ce n’est de maximiser les rencontres avec d’autres pêcheurs, d’échanger et surtout d’aller au bord de l’eau car c’est bien là où l’on apprend le plus et le plus rapidement, en étant confronté à la difficulté. Les « clubs mouche » foisonnent de passionnés et sont donc des endroits à privilégier. J’adore les débutants. J’en ai eu plusieurs cette année en stage, dans le cadre de mon activité de moniteur-guide et je prends plaisir à les faire travailler pour qu’ils deviennent rapidement autonomes dans des situations de pêche simples. Comme tout autre sport, la pêche à la mouche s’apprend grâce à des méthodes pédagogiques précises que j’utilise au quotidien,tant dans ma pratique que dans l’enseignement que je propose. Enfin pour moi, la pêche en sèche est la base de la pêche à la mouche et c’est par cette « sous-technique » que tout débutant doit passer. En tant que moniteur, c’est à partir de cette base que nous pouvons décliner le reste (sèche-nymphe, nymphe etc). Lors de tous mes stages, la première mouche que je sors, c’est une sèche.

Fred : « Quelle est ta rivière préférée en France ? Pourquoi ? »

Quelle question ! à ton avis !? pas une mais plusieurs et donc les Nives dans leur ensemble, bien entendu.

J’avoue que j’ai un faible pour l’amont du Lauhribar, mais pas seulement pour la rivière, mais plutôt pour l’ensemble de la vallée de l’Hergaray, ses paysages, son ambiance, sa proximité avec Iraty.

Mais bon, j’aime toutes les Nives et leurs affluents et là encore pas seulement pour la pêche. Tu sais, quand tu travailles au quotidien depuis des années avec des agriculteurs, des élus, des commerçants, des enseignants, des techniciens de différents horizons, bref des acteurs de ce territoire, tu y as forcément un attachement qui dépasse de loin la pêche.

J’ai pourtant pêché dans quelques endroits en France qui valent aussi leur pesant d’or : Corrèze, Lozère, Ariège, Aveyron, Hérault, Hautes Alpes, Alpes de Haute Provence, Normandie, Hautes Pyrénées, Ardèche, Haute Loire.

Les pêcheurs voyagent beaucoup pour trouver leur petit paradis alors que le patrimoine halieutique de certaine région de l’hexagone me semble tout de même exceptionnel

Fred : « Quelle est ta destination pêche préférée à l’étranger ? Pourquoi ? »

Je n’ai pas beaucoup de destinations à mon actif mais pas mal d’heures de pêche au Québec, en Irlande et en Espagne, mais j’espère bien développer cette liste dans les années à venir. L’Irlande reste une destination unique pour moi. Il y a tellement de possibilités. En une seule journée, tu peux pêcher la truite, le saumon, la truite de mer, le brochet, le bar. C’est assez rare et puis l’ambiance, les gens, les paysages, la Guinness, le Rock ! Enfin bref, tout ce que j’aime !

glenveagh national park

 

 

 

Fred : « Quelle est ta mouche préférée ? Pourquoi ?

Je n’ai pas de mouche préférée car, j’essaie de m’adapter à toutes les situations que je rencontre et je ne suis pas un ayatollah de l’imitation parfaite. Pour tout te dire, je n’y crois pas beaucoup, même si j’ai été confronté quelques fois, à des poissons avec bac+10 en montage de mouche ! Je suis pas mal CDC, pas trop coq pour les sèches et assez simple dans mes montages nymphes. J’essaie de rester pragmatique et de varier les teintes, les tailles, les poids et les flottaisons.

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Fred : « Quel est ton meilleur souvenir de pêche à la mouche ? »

Il n’est pas très vieux. C’était en mai 2016, je rentrais d’une journée d’analyse de qualité de l’eau sur tout le bassin et de rendez-vous avec des riverains pour des projets de restauration. Sur la route, je me décide à m’arrêter le long de la Nive. Je te raconte :

Me voilà posté à l’arrière d’une de ces bordures si productives de la Grande Nive, loin d’imaginer que j’allais vivre mon plus grand moment de pêche. En cette fin de journée de mai, des nuées de petits sedges tournent au-dessus de la rivière. Plusieurs truites sont à table le long de la bordure. Sûr de moi, je m’avance pour attaquer la première. Alors que j’amorce mon lancer, je me fige et me retrouve plaqué au sol en un quart de seconde. Là, à 3 mètres de moi, sur cette plage insignifiante où je n’ai jamais vu que des vairons, complètement à découvert, un monstre vient de gober. Je rampe et tremble comme les feuilles de renouée que je traverse pour me repositionner derrière ce poisson. En l’observant gober tout ce qui passe à sa portée, mon cœur s’emballe et je me décide à lui présenter mon imitation que je viens de nouer à une nouvelle pointe en 15 centièmes. Un petit sedge à droite puis mon oreille de lièvre à gauche disparaissent dans cet énorme bec qui perce la surface. Je ferre et l’énorme bécard fonce vers le pool, mon Vivarelli pleure et avant même que je m’aperçoive qu’il est vide, ma soie se détend. Cassé ! Je m’écroule sur les galets et rumine pendant un bon quart d’heure, avant de reprendre mes esprits. Mais voilà, aujourd’hui c’est mon 31 ème anniversaire et alors que la Nive vient de m’offrir l’occasion de prendre la plus grosse truite de ma vie, elle n’en a pas fini avec moi. Je reviens vers la bordure prometteuse et attaque le premier gobage. Ferrage, c’est gros, puissant et ça saute dans tous les sens. Mon moulinet prend une deuxième valse et quelques minutes plus tard je mets au sec une magnifique truite de mer. Je suis comblé, mais la partie n’est pas finie, puisque j’en prendrai 2 autres dans la foulée. Un triplet de truites de mer et un aperçu d’un monstre des Nives, je suis aux anges. Je suis resté un long moment à contempler la Nive en savourant ce cadeau qu’elle venait de me faire.

Fred : « Tu étais technicien pour l’AAPPMA de la Nive est tu es maintenant guide de pêche, tu peux m’en dire plus ?

Effectivement, j’ai eu une chance immense de pouvoir travailler au sein de l’AAPPMA de la Nive et je remercie au passage toutes les personnes de cette association avec qui nous avons œuvré durant ces années. Il y a pratiquement 11 ans que j’ai mis mon premier pied à l’AAPPMA en tant que postulant pour un stage de licence que j’ai effectué quelques temps plus tard. J’y suis donc devenu stagiaire, puis bénévole, puis garde et enfin technicien. Avec les bénévoles, nous avons cherché à développer les différents secteurs d’activités de l’association et notamment l’animation auprès des jeunes. C’est donc dans ce cadre que j’ai passé mon diplôme de moniteur-guide de pêche en 2012. A partir de là, j’ai surtout fait de l’animation pour les centres de loisirs, les écoles et je me suis occupé de l’école de pêche. Je faisais rarement du guidage mais, cette année 2012 reste le point de départ de ce que je suis aujourd’hui, car j’ai fait la connaissance de mentors, j’ai connu le monde de la compétition et fréquenté des « As » de la pêche à la mouche. Tout ça m’a permis d’évoluer très rapidement dans ma pratique et d’arriver à un niveau qui m’a permis d’évoluer, d’échanger et d’apprendre aux côtés des meilleurs pêcheurs de France, de Navarre, d’Euskadi et du monde. Dans cet univers, tu apprends tellement vite !
J’ai quitté l’AAPPMA en décembre 2016. Avec le recul, je pense qu’il est difficile de rester constant au fil des années quand tu essayes de convaincre de multiples interlocuteurs que tel ou tel projet de restauration est important. À la fin, je pense que j’ai un peu perdu un peu « la foi ». Disons qu’aujourd’hui, je me sens plus à l’aise lorsque j’accompagne, forme et sensibilise mes stagiaires à mon univers. Je crois que finalement, j’aime trop la pêche et tout ce qui l’entoure pour faire autre chose dans ma vie. Pour moi, la pêche est le meilleur vecteur de sensibilisation aux problématiques liées aux milieux aquatiques et je m’efforce de rester acteur du bassin des Nives avec cette philosophie.

Fred : « On peut supposer que l’œil du technicien est désormais au service de tes clients ? »

Oui c’est un peu ça et j’ai d’ailleurs beaucoup de retours des personnes que j’ai accompagné qui souligne cet aspect de mon profil. J’ai passé 7 ans sur le terrain à parcourir les cours d’eau du bassin, à relever les perturbations, à surveiller la qualité de l’eau, à inventorier les frayères, identifier les points de blocages pour la migration vers les zones de reproduction, à faire des pêches électriques etc etc… Il n’y a pas si longtemps, je me suis amusé à calculer : 35H (sans compte les heures supp !!) X 7 ans (1800 jours ouvrés pour faire un compte rond) soit 45000 heures ! ça en fait du temps à batailler pour les Nives, non !? Forcément, une telle expérience t’amène une connaissance pointue de ton territoire et de son évolution au fil des saisons. Toute cette expérience, c’est une grande partie de ma vitrine, et je l’associe à la technicité que je peux apporter grâce à mon expérience dans le monde de la compétition dont on vient de parler.
Merci Fred pour cet échange ! Pour te remercier, pourquoi pas se faire une sortie ensemble histoire de parler encore et toujours des Nives et de pêche à la mouche !

Fred : “vous vous doutez de ce que je vais lui répondre ;). Merci Glenn pour cet interview ! “

 

retrouvez Glenn sur son si beau site : www.madeinriver.fr

guide-de-peche-mouche-pays-basque

 

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3 réponses

  1. Glenn dit :

    Merci à toi Fred et à bientôt au bord des Nives!

  2. FARIOMAN dit :

    Salut les puristes de NOS Nives,

    Bel article Fred et joli site Glen : Bonnes réussites…

    VIVEMENT L’OUVERTURE 2018.

  3. urtizverea dit :

    tres belle histoire bon je continue à monter des mouches car après le confinement vite sur les nives

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